Reportage Info-Pilote : le Globe Swift de Saint-Dizier
« Et si on achetait un Globe Swift ? »
a un jour lancé Erik Muard, pilote de Saint-Dizier, alors que la joyeuse bande de l’aéroclub, menée par son truculent président Jean-Louis Marcireau, tentait de trouver une nouvelle machine pour le club.
« Nous sommes comme des gosses, on aime l’aviation, la vraie et on aime les machines qui nous font rêver. Pourquoi se priver ? Au début, nous cherchions un Van’s RV-7, mais nous n’en trouvions pas à vendre. Et puis Cédric Ruet, l’ancien présentateur du Rafale, membre du club, nous emmenait de temps en temps en vol à bord de son Globe Swift lors de ses passages sur la base. Pas fou l’animal, il ne nous laissait pas les clés pendant la semaine, mais nous étions tous tombés sous le charme de cette machine à la fois belle, performante et historique », explique Jean-Louis avec sa verve inimitable.
La force de l’aéroclub de Saint-Dizier tient dans la bonne entente et les multiples compétences de ses membres. Il faut dire que Jean-Louis, l’âme et l’animateur de cet aéroclub, déborde d’énergie et de passion (on écrirait presque dévotion) pour faire vivre l’esprit aviateur au sein de ses murs. Un club qu’il a repris en 2005…
AUX COMMANDES DU SWIFT
« Quand tu passes d’un DR-400 au Swift, il y a une charge de travail importante », confie Benoît Noel.
« Ce n’est pas un avion difficile à piloter, poursuivent Thierry Kubiak et Jean-Louis Marcireau, mais il requiert de la rigueur dans l’application des procédures et un minimum de division d’attention. Train rentrant, pas variable, c’est un avion à procé-dure. Ça se pilote.
Tout d’abord l’avion est puissant avec 210 hp, l’accélération est rapide lors de la course au décollage avec un couple significatif (moteur puissant et hélice métal-lique). Décollage sans volets, 70 mph rotation, montée, il faut lui tirer sur le nez pour ne pas emplafonner 80 mph qui est la vitesse de rentrée du train.
L’avion est accroché à l’hélice. 23/24, l’EGT, le fuel flow, il faut s’en occuper. Mise en palier, à 65 % on a 23 à la Pression d’Admission et 24 à l’hélice, le Swift prend ses 130 kt pour 37 l/h. A 75 % on a 145 kt. Une fois en l’air, l’avion est extrêmement agréable à piloter puisque très homogène sur les 3 axes.
Il faut rester vigilant dès qu’on laisse tomber le nez car l’avion accélère très vite et la Vne (185 mph) peut vite être atteinte. Voltige souple, le vintage de l’après-Seconde Guerre mondiale (bien qu’il fît son premier vol en 1940) est plutôt joueur. En vent arrière, sous 100 mph : sortie du train. En étape de base, sous 90 mph : sortie des volets (pleins volets en une fois). La vitesse recomman-dée en finale est de 75 mph mais on s’est rendu compte qu’avec 80 mph c’était plus confortable. Il décroche à 60 mph. La vitesse est facile à tenir, mais attention dès qu’on réduit c’est une enclume.
A l’atterrissage, on n’arrondit pas. On l’approche donc avec du moteur. Au toucher des roues deux points, réduction, on pousse sur le manche. Si on tire, bienvenue au pays des kangourous. Avec cette technique, […] il ne bouge pas et s’accommode presque mieux des pistes en dur que des pistes en herbe. Par vent de travers, le Swift est très sympa et pas vicieux », confient nos deux pilotes.
Ce n’est pas un avion difficile mais il faut s’en occuper. Bien sûr, il n’est pas à mettre entre toutes les mains mais ça donne aux pilotes du club un objectif à atteindre.
MISE AU POINT
Le Swift arrive au port du Havre en décembre 2017.
N77Y débarque en conteneur à Dijon par transport routier. Il faut s’attaquer au remon-tage et surtout à la mise au point. C’est la partie qui prendra le plus de temps.
« On a eu un tas de soucis qui se sont enchaînés », explique Jean-Louis.
« Siège cassé lors de la première montée à bord, démarreur à remplacer, fuite au niveau du filtre à huile, jeu dans les ailerons, installation de freins en place droite, joints d’admission, bol décanteur et surtout de grosses vibrations moteur, interrupteurs magnétos, inverseur de trim, tôle du plancher qui lime les tubes d’essence, cosse de batterie HS, joints d’admission. Nous pensions que c’était dû aux magnétos mais on s’est rendu compte que c’était en fait un problème d’indice d’octane car l’essence n’est pas la même en Europe qu’aux Etats-Unis.
Comme le moteur 6 cylindres 210 hp fonctionne avec des injecteurs Gami, il faut un réglage très précis de la pompe à injection/pression. Nous avons trouvé la solution avec le sorcier du 6 cylindres à Châlons-Ecury-sur-Coole (LFQK), chez Air Service », poursuit-il.
« Cette mise au point nous a pris un an et on s’en est bien sorti financièrement. A l’issue, en décembre 2017, un inspecteur de la FAA basé à Toussus-le-Noble réalise la visite de l’avion à Châlons. Tout était bon.
Thierry Kubiak, pilote de Rafale expérimenté et pilier du club, a pu convoyer l’avion à Saint-Dizier le 8 janvier 2018 et réaliser les premiers essais en vol.
Même si toute cette année de mise au point a été frustrante on peut dire au final qu’elle a été bénéfique car ça nous a permis d’apprendre l’avion par cœur et de voler sereinement aujourd’hui, analyse Jean-Louis Marcireau. Je dois aussi remercier Alain Oswalt, l’homme qui gère la mécanique depuis soixante ans à l’aéroclub et qui a fait un travail formidable encore une fois. »
L’aéroclub de Saint-Dizier remercie Jean-Marie Urlacher pour son article et ses photographies, Info-Pilote pour la publication de l’article intégral. https://www.info-pilote.fr